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De nouveaux signaux précédant les ondes sismiques : comment les perturbations précoces de gravité permettent de quantifier la magnitude des forts séismes

Les tremblements de Terre changent brutalement l’équilibre des forces dans la Terre au niveau de la rupture, ce qui génère des ondes sismiques se propageant dans la croûte et le manteau terrestre à des vitesses entre 3 et 10 km/sec. Ces ondes potentiellement dévastatrices sont les principales manifestations des séismes, et permettent depuis les débuts de la sismologie de les localiser et de quantifier. Cependant, dans une perspective de détermination rapide de l'ampleur d'un séisme, particulièrement importante pour anticiper l'arrivée d'un possible tsunami, les sismologues se heurtent au délai incompressible associé au temps de propagation des ondes avant leur arrivée aux sismomètres.

De nouveaux signaux précédant les ondes sismiques : comment les perturbations précoces de gravité permettent de quantifier la magnitude des forts séismes

Signal élasto-gravitaire

Date de publication : 01/12/2017

Observatoires, Presse, Recherche

Observatoires liés : Observatoire GEOSCOPE

Thèmes liés : Risques naturels

Mais ces ondes sismiques sont aussi à l’origine d’un autre phénomène physique : dès leur génération par le séisme – puis au cours de leur propagation – elles causent des dilatations et des compressions du milieu, dont l’effet cumulé perturbe faiblement, mais immédiatement (1), le champ de gravité partout dans la Terre. Et bien que présent dans les équations théoriques complètes du mouvement sismique, ce signal précoce lié à la gravité n’a été que très récemment considéré. Dans une première analyse en 2016 (2), un tel signal a été détecté sur un gravimètre lors du séisme de Tohoku (Japon, 11 mars 2011, magnitude 9.1).

Dans une étude publiée dans le journal Science le 1er décembre 2017, des chercheurs de l’IPGP, de l’université Paris Diderot, du CNRS et du Caltech, ont retravaillé sur ce même séisme, et ont permis d’aller beaucoup plus loin dans l’observation et la compréhension du phénomène. Tout d’abord, le signal est observé sur une dizaine de sismomètres large-bande à des distances comprises entre 500 et 3000km du séisme. Ce signal est mesuré de manière concordante et avec un haut rapport signal-sur-bruit. La qualité des signaux a ensuite permis de se pencher sur leur origine précise. L’équipe de chercheurs a ainsi compris que la forme des signaux est due à la combinaison de deux effets : un effet direct dû à la perturbation de gravité qui déplace la masse du sismomètre, et un effet induit dû aux ondes sismiques générées par les perturbations de gravité au voisinage du sismomètre. En effet, de manière analogue à un séisme, mais à une échelle beaucoup plus petite, un changement de gravité perturbe l’équilibre des forces dans le milieu terrestre, ce qui est à l’origine d’ondes sismiques.

La prise en compte de ces deux effets permet de très bien expliquer les données et montre aussi que le signal précoce lié à la gravité est très sensible à la magnitude du séisme. Dans le cas du séisme de Tohoku, sa magnitude supérieure à 9 aurait ainsi pu être déterminée dans les minutes suivant son occurrence, bien avant ce qui peut être fait par les méthodes conventionnelles. Le défi futur est de pouvoir utiliser cette information pour des séismes de magnitude nettement plus faible. Pour un séisme de magnitude 8, le bruit sismique de la Terre rend en effet déjà les instruments actuels aveugles au faible signal lié aux perturbations de gravité. Plusieurs technologies, dont certaines inspirées des instruments développés pour la détection des ondes gravitationnelles, sont envisagées pour faire un nouveau pas en avant dans la détection de ces précieux signaux.

Notes :

  • 1 – plus exactement à la vitesse de la lumière (300 000km/s)
  • 2 – J.-P. Montagner et al., Nat. Commun. 7, 13349 (2016).

La carte indique la localisation des sismomètres (triangles) ayant détecté un signal précoce à la suite du séisme de Tohoku (étoile) du 11 mars 2011 (Japon, magnitude 9.1). On se focalise ici sur une station au Nord-Est de la Chine (MDJ), située à 1280km du séisme. A ces distances, les ondes sismiques directes arrivent environ 165s après le temps origine, comme indiqué dans l’encart. Cependant, bien que d’amplitude beaucoup plus faible, un signal clair est détecté par le sismomètre avant ces ondes directes.

L’origine de ce signal se comprend en se plaçant à des temps compris entre le temps origine et celui de l’arrivée des ondes : par exemple, environ 55s après le déclenchement du séisme, les ondes sismiques se sont propagées dans le volume indiqué en gris, et sont sur le point d’atteindre la station MAJO. A l’intérieur de ce volume, les ondes causent des compressions et des dilatations du milieu, comme indiqué dans la coupe du bas. La contribution globale de toutes ces zones dont la masse change conduit à une modification immédiate de la gravité détectée par le sismomètre (effet direct). Le champ gravitationnel est également perturbé partout dans la Terre, et chacune de ces perturbations est une force qui est à l’origine d’ondes sismiques secondaires (effet induit).

Dans le volume à proximité du sismomètre (indiqué en vert), ce champ sismique secondaire arrive avant les ondes directes. Le sismomètre enregistre ainsi, avant les ondes sismiques directes, un signal élasto-gravitaire découlant des effets direct et induit des perturbations de gravité.

Réf : M. Vallée, J. P. Ampuero, K. Juhel, P. Bernard, J.-P. Montagner & M. Barsuglia, Observations and modeling of the elastogravity signals preceding direct seismic waves, Science, doi : 10.1126/science.aao0746

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