Il a d’abord fallu trier et calibrer précisément l’ensemble des images brutes, puis essayer de réduire l’influence de l’atmosphère, avant d’obtenir ces cartes globales de la surface à différentes longueurs d’ondes. Combiner les observations entre elles permet ensuite de mettre en évidence la diversité géologique et de révéler les principales unités en termes de composition, et ce à l’échelle globale. La technique des rapports de bandes, où l’on divise une image prise à une longueur d’onde par une image prise dans une autre longueur d’onde, s’est révélée particulièrement efficace pour mettre en évidence les variations de composition.
Dans la vidéo synthétique ci-dessous, montrant la surface de Titan en fausses couleurs, une large zone apparaît en marron au niveau de l’équateur tout autour du satellite. Cette zone correspond à d’immenses champs de dunes lorsqu’on la compare localement aux images du radar de Cassini (qui ne couvrent que les deux tiers de la surface). D’autres régions bleutées apparaissent sur cette nouvelle carte, traduisant la présence de terrains de composition différente, pouvant s’expliquer par un enrichissement local en glace d’eau ou bien en composés organiques. Les cratères Sinlap ou Menrva, que l’on voit dans la vidéo, en sont de bons exemples. L’intégration de l’ensemble du jeu de données VIMS dans une carte synthétique permet une comparaison plus fine avec les autres observations, comme celles du radar de la sonde Cassini, ou bien avec les images prises par le module Huygens lors de son atterrissage, comme on peut également le voir à la fin de la vidéo.
Lors du processus d’analyse des données, des outils de prévisualisation de chaque observation spectrale individuelle ont été mis en place. Chacun peut maintenant facilement accéder en quelques clics à la beauté des images infrarouges de Titan (et des autres satellites de glace) à l’aide du site web https://vims.univ-nantes.fr.
Cassini nous a révélé toute la richesse géologique de Titan, le seul corps en dehors de la Terre à avoir des pluies, des rivières, des mers, formés par des hydrocarbures à 180°C, et non de l’eau. Tout ce que nous avons appris nous donne fortement l’envie d’y retourner avec de nouveaux moyens d’investigation.
Réf S. Le Mouélic, T. Cornet, S. Rodriguez , C. Sotin, B. Seignovert, J.W. Barnes, R. H. Brown, K. H. Baines, B. J. Buratti, R. N. Clark, P. D. Nicholson, J. Lasue, V. Pasek, J. M. Soderblom (2019) The Cassini VIMS archive of Titan: From browse products to global infrared color maps, Icarus, 319, doi:10.1016/j.icarus.2018.09.017 (arxiv.org/abs/1809.06545)