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La surveillance en temps de crise

Deux publications scientifiques viennent de paraître dans Seismological Research Letters confirmant la capacité des observatoires de l'IPGP à faire face aux crises majeures survenues ces dernières années, qu'elles soient climatiques à travers le passage dévastateur des cyclones Irma et Maria aux Antilles ou sanitaires avec la gestion d'une éruption au Piton de la Fournaise à la Réunion en pleine période de confinement.

La surveillance en temps de crise

L’Institut de physique du globe de Paris a la charge de services d’observations labellisés en volcanologie à travers ses observatoires permanents sur les îles de La Réunion (OVPF), de Guadeloupe (OVSG) et de la Martinique (OVSM), ainsi que via le REVOSIMA pour Mayotte. Depuis leur création, ces observatoires ont développé un large et dense réseau de surveillance ainsi que de nombreuses et solides coopérations nationales et internationales. Ces atouts leur ont permis de faire face à de nombreux défis ces dernières années, notamment suite aux cyclones Irma et Maria aux Antilles en 2017 et, plus récemment, suite à l’éruption du Piton de la Fournaise à la Réunion en avril 2020, en pleine période de confinement dans le cadre de la crise sanitaire. Ces deux situations extrêmes mettent en lumière la résilience et le professionnalisme des équipes œuvrant au sein de ces observatoires.

Le réseau sismologique WI résiste au passage successif de deux cyclones majeurs

Déployé entre 2008 et 2014 par l’IPGP et le Seismic Research Center de l’Université des West Indies à Trinidad et Tobago, le réseau sismologique large-bande WI s’étend du nord au sud de l’arc des Petites Antilles. Afin de s’affranchir des risques naturels pouvant affecter chacune des îles (cyclones, séismes, tsunamis, éruptions volcaniques), les stations ont été conçues avec des technologies de pointe qui renforcent leur résilience face à ces phénomènes potentiellement destructeurs. Ainsi, la technologie VSAT de Nanometrics permet aux observatoires de Guadeloupe (OVSG), de Martinique (OVSM) et au SRC (Trinidad) de recevoir leurs données directement par satellite. En outre, un cœur de réseau composé de quatre stations et d’un hub de réception est équipé de radômes de protection pour résister aux vents cycloniques.

Le 5 septembre 2017, le cyclone Irma franchit le nord des Petites Antilles et des vents de plus de 350 km/h détruisent les installations de surface de la station SBLM de Saint-Barthélémy, située sur la trajectoire de l’œil du cyclone. Trois semaines plus tard, c’est au tour de l’ouragan Maria de traverser l’arc des Antilles en son centre, passant à proximité voire directement sur les îles de la Martinique, de la Dominique puis de la Guadeloupe. Aucune station en fonctionnement n’est détruite par ce second cyclone.

Les fortes pluies impactent d’abord l’OVSM, contraignant les équipes à rediriger la collecte des données depuis l’OVSG. Dans la nuit, le cyclone génère des dégâts sur les bâtiments et l’antenne de réception de l’observatoire de Guadeloupe, le rendant inopérant pendant trois jours. Au matin du 19 septembre 2017, la collecte par le centre de données de l’IPGP de l’ensemble des données du réseau WI est rétablie par le biais de l’OVSM. Quelques heures plus tard, le réseau permet l’enregistrement du séisme de Puebla (Mexique, Mw 7.1) sur 12 des 15 stations du réseau.

L’expérience et l’expertise des observatoires de l’IPGP dans la conception et le maintien en conditions opérationnelles des réseaux de mesures en milieu tropical auront permis de limiter l’interruption de transmission des données au SATCAR à une durée inférieure à 12h.

Carte du réseau sismologique large-bande WI avec la trajectoire des cyclones Irma et Maria. Les stations cerclées de noir sont équipés d’un radôme de protection. La taille des symboles cycloniques est proportionnelle à la vitesse des vents moyens estimés par la NOAA (administration météorologique US en charge des cyclones pour le bassin Caraïbe).
Photos de la station sismologique de Saint-Barthélémy avant et après le passage de l’œil du cyclone Irma de catégorie 5.

Suivi en temps réel d’une éruption « confinée »

En France métropolitaine et dans les DOM, un confinement général de la population a été décidé par les autorités du 17 mars au 11 mai 2020 pour restreindre les voyages et les interactions sociales, dans un effort mondial de lutte contre la pandémie de COVID-19. Au même moment, du 2 au 6 avril, le Piton de la Fournaise sur l’île de la Réunion entrait en éruption.

Précurseurs à court terme précédant l'éruption du 2 au 6 avril 2020. (a) Signaux sismiques enregistrés sur la composante verticale de 19 stations du réseau OVPF entre 03h00 UTC et 11h59 UTC le 2 avril pour chaque heure (le temps augmente vers la droite). Chaque barre verticale rouge représente un séisme. (b) Carte de trémor calculée pour la période 08h45-09h00. (c) Cartes des déplacements est-ouest (à gauche), nord-sud (au milieu) et verticaux (à droite), associés à l'éruption du 2 au 6 avril 2020 calculés à partir de données interférométriques Sentinel-1, PAZ et ALOS2. Les cercles pleins représentent les déplacements enregistrés sur les stations GNSS permanentes OVPF. L'intensité des déplacements est donnée par la barre colorée.

Dès l’annonce gouvernementale, un plan de continuité d’activité a été mis en œuvre par l’IPGP, qui gère l’Observatoire Volcanologique du Piton de la Fournaise (OVPF), afin de maintenir les opérations de surveillance en télétravail tout en autorisant les interventions sur le terrain en cas de situations critiques, telles que des pannes graves sur des stations temps réel ou des relais de transmission.

Cette éruption a été l’occasion pour l’observatoire de valider sa capacité à gérer une crise volcanique avec des réseaux de surveillance 100% télémétrés, sans aucune mesure de terrain complémentaire au niveau du site éruptif. Les précurseurs à court et long terme de l’éruption ont permis au personnel de l’OVPF de fournir aux différentes parties prenantes (préfecture et État-Major de Zone et de Protection Civile de l’Océan Indien) les informations de suivi de l’activité du volcan en temps réel. La densité et la fiabilité des réseaux de l’OVPF, avec des stations sur le terrain enregistrant et émettant en continu, associées aux observations satellitaires, ont permis une surveillance instrumentale fiable de l’éruption et la continuité des missions de l’observatoire.

Ce succès repose sur des protocoles existants, opérationnels 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, et sur une accessibilité à distance aux données en temps réel. Des réseaux et protocoles similaires existent dans les autres observatoires volcanologiques de l’IPGP.

Prise de vue du site éruptif le 5 avril 2020 (© SAG / PGHM)

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