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Biominéralisation et diagenèse des sulfures de fer produits par les bactéries sulfato-réductrices : approches expérimentales

17/12/2021

IPGP - Îlot Cuvier

14:00

Soutenances de thèses

Amphithéâtre

Arnaud Duverger

Géochimie des isotopes stables (GIS)

Les sulfures de fer sont omniprésents dans les roches sédimentaires et se sont révélés particulièrement utiles pour reconstruire l'évolution des paléoenvironnements terrestres. Leur propension à receler des biosignatures, en particulier celles des micro-organismes sulfato-réducteurs, est également utilisée pour tracer l'évolution de la biogéosphère mais reste souvent débattue. En effet, dans les environnements modernes, les bactéries sulfato-réductrices (SRB) jouent un rôle clé dans la réduction des sulfates en sulfures qui peuvent, en présence de métaux, précipiter des minéraux comme la pyrite (FeS2). Cependant, l'implication directe des SRB dans la formation de pyrite sédimentaire est encore mal comprise en raison des échecs à obtenir cette réaction dans des cultures monospécifiques en laboratoire. L'étude en laboratoire est pourtant une étape essentielle pour pouvoir préciser les mécanismes de formation des sulfures de fer, le rôle des SRB et en extraire des biosignatures robustes. Au cours de ce travail de thèse, plusieurs approches expérimentales ont été explorées afin de caractériser les processus de biominéralisation de sulfures de fer par les SRB ainsi que leur évolution diagénétique. Une première approche s'est appuyée sur des enrichissements bactériens (plurispécifiques) réalisés à partir des eaux anoxiques et ferrugineuses du lac Pavin (Massif Central). Elle a montré que les SRB pouvaient se développer dans des milieux pauvres en sulfates et avoir un rôle important dans la biominéralisation des phases porteuses de fer grâce aux interactions avec d'autres métabolismes microbiens et à la mise en place d'un cycle cryptique du soufre. Une seconde approche s'est focalisée sur des cultures monospécifiques d'une souche modèle de SRB (Desulfovibrio desulfuricans) en présence de différentes sources de fer (ferreux dissous ou nanoparticules de phosphate ferrique). Les deux conditions ont conduit à la formation rapide (une semaine) de monosulfures de fer (FeS) présentant cependant des différences morphologiques. En effet, en présence de fer dissous, les sulfures de fer précipitaient sous forme de particules micrométriques rappelant des bactéries encroûtées alors qu'en présence de phosphate de fer, ils ont pris la forme d'un biofilm minéralisé. Après un mois, des pyrites sont apparues au sein de ce biofilm tandis que les cultures en présence de fer dissous n'ont pas évolué. Ces résultats, qui comptent parmi les rares synthèses de pyrites biogéniques, ont permis de préciser les mécanismes de formation des pyrites en lien avec l'activité des SRB. Dans les mêmes conditions de culture, les compositions isotopiques des sulfates, FeS et pyrites ont été mesurées afin de préciser les fractionnements isotopiques liés à la production de sulfures de fer par les SRB, là où les études précédentes s'étaient arrêtées à la formation de sulfure d'hydrogène. Nos résultats ont montré que la sulfato-réduction microbienne détermine le fractionnement majeur par rapport à la précipitation des sulfures de fer. Par ailleurs, des résultats préliminaires en multi-isotopie du soufre ont révélé des signatures distinctes sur la masse 36 selon la source de fer utilisée dans les cultures. Finalement, la diagenèse expérimentale des sulfures de fer abiotiques et biogéniques précédemment obtenus a conduit dans les deux cas à la formation de pyrite mais une nouvelle fois, une dichotomie majeure a été observée concernant leur morphologie. Là où les pyrites obtenues à partir des sulfures de fer abiotiques formaient des cristaux euhédriques semblables à ceux observés dans les sédiments pauvres en matière organique, celles obtenues à partir des produits des cultures ressemblaient à des agrégats sphérulitiques. Ces agrégats, distincts des framboïdes, pourraient avoir été négligés jusqu'à présent dans les environnements sédimentaires et leur recherche permettrait d'ouvrir une nouvelle voie vers l'identification des pyrites biogéniques dans les environnements naturels.