UNREST : Compréhension des signaux de surveillance en termes de processus magmatiques pré-éruptif dans le but de mieux contraindre la prévision des éruptions volcaniques
Début : 01/04/2025 - Fin : 01/04/2029
Partenariat national
Coordinateurs : Carole Berthod
Établissements porteurs :
IPGP, IPGP
Établissements partenaires :
OVSG-IPGP, IPGP, LMV-UCA, Université Paris Saclay, BRGM, SEDISOR
Observatoires liés :
Observatoire volcanologique et sismologique de la Guadeloupe (OVSG-IPGP)
Équipes liées :
Systèmes volcaniques
Projet financé par l’Agence Nationale de la Recherche (ANR), sous la subvention “ANR- 21-CE49-5386 (projet UNREST)”
De nombreux efforts ont été faits afin d’anticiper l’activité éruptive des volcans en s’appuyant sur des approches telles que la surveillance sismique et géodésique, ou les variations de la composition des gaz. Cependant, il est de plus en plus indispensable de comprendre la signification de ces signaux en termes d’évolution des systèmes magmatiques en profondeur et de leur dynamique de déstabilisation. De plus, sur de nombreux volcans, il n’existe pas de bons enregistrements instrumentaux des éruptions passées, et le besoin de quantifier et d’établir les liens de causalité entre les processus magmatiques profonds et les processus éruptifs en surface est donc encore plus crucial. Ce défi est au coeur du projet UNREST, orienté vers la contribution de la pétrologie et de la géochimie pour la surveillance des réactivations des systèmes volcaniques. Dans ce projet, nous reconstruirons le système magmatique sous La Soufrière de Guadeloupe et son évolution au cours du temps, en nous appuyant sur les compositions chimiques et les propriétés physiques des produits volcaniques. Nous identifierons et caractériserons les processus magmatiques conduisant à la rupture d’un réservoir magmatique et l’ascension du magma ainsi que leur cinétique associée. Ces résultats seront ensuite modélisés en termes de signaux géophysiques pouvant être enregistrés par les réseaux de surveillance et seront appliqués sur La Soufrière de Guadeloupe. Les résultats de UNREST seront partagés avec les observatoires volcanologiques de l’arc des Petites Antilles.
Le projet UNREST est divisé en 4 work-packages (Figure 1) qui vont nous permettre de caractériser le système magmatique ayant alimenté les éruptions de la Soufrière de Guadeloupe de la source à la surface et faire le lien avec les signaux de surface enregistrés par le réseau de surveillance de l’Observatoire Volcanologique et Sismologique de Guadeloupe (OVSG, IPGP).
Le projet implique une quinzaine de chercheurs issus de 6 instituts (l’OVSG-IPGP, l’IPGP, le LMV-UCA, Université Paris Saclay, le BRGM, et SEDISOR) et formera 2 doctorants et recrutera un postdoctorant.

Figure 1: Contenu des work-packages (WPs) de l’ANR JCJC UNREST.
WP1 : Comment les processus du manteau profond contrôlent-ils la recharge et l’évolution des réservoirs de magma et l’activité volcanique ?
La production de magma dans le manteau et les processus de transfert en profondeur sont de plus en plus considérés comme contrôlant la recharge et l’évolution des réservoirs de magma, et finalement l’activité volcanique (Vlastelic et al., 2023). Cependant, les processus magmatiques dans les zones de stockages et au cours de la remontée du magma brouillent les signatures des processus profonds, en particulier dans les arcs. Pour mieux comprendre comment les processus profonds du manteau contrôlent l’activité de La Soufrière, nous ferons appel aux isotopes radiogéniques à longue durée de vie (Sr, Nd, Pb) qui permettent de voir au-delà des processus crustaux. Des compositions isotopiques seront mesurées dans une série de fragments juvéniles provenant des éruptions de La Soufrière et du volcanisme de Basse Terre, afin de (1) caractériser la structure fine de la source mantellique, (2) comprendre comment les composants du manteau sont échantillonnés au cours de l’histoire de la construction de La Soufrière, et identifier le lien avec l’activité éruptive à la surface, et (3) identifier les tendances temporelles potentielles indiquant l’appauvrissement ou la refertilisation de la source.
WP2 : Quelle est l’architecture et la dynamique du système magmatique de La Soufrière ?
Les conditions pré-éruptives et l’évolution du système magmatique alimentant les éruptions effusives et explosives de La Soufrière seront reconstituées en utilisant des méthodes pétrologiques (thermobarométrie, concentrations en volatils dans les inclusions magmatiques) et géochimiques (modélisation des éléments majeurs et traces) sur des fragments juvéniles. Nos principaux objectifs sont de localiser précisément les différents niveaux de stockage de magma dont la réactivation pourrait être identifiée par la sismologie et de contraindre les paramètres pré-éruptifs qui peuvent exercer une forte influence sur le style éruptif (teneur en volatils, cristallinité, etc). Notre étude permettra ensuite d’identifier les processus qui ont pu conduire à la rupture des réservoirs magmatiques, à l’ascension du magma vers la surface et à l’éruption. De plus, les xénoliths plutoniques, ramenés à la surface lors des éruptions et représentant des portions du mush ou des cumulats, seront utilisés pour déterminer la nature des processus crustaux post- et syn-magmatiques.
WP3 : Quelle est la cinétique de ce système magmatique ?
Le WP3 se concentrera sur l’activation temporelle du système magmatique peu profond avant et pendant les épisodes éruptifs. Ainsi, la chronométrie de diffusion sera appliquée à des cristaux zonés pour fournir des échelles de temps entre l’injection de magma et les éruptions et sera comparée aux cinq éruptions déjà étudiées (Metcalfe et al., 2022 et références associées). En outre, les caractéristiques texturales seront utilisées pour distinguer les processus d’ascension du magma superficiels et tardifs se produisant sur des échelles de temps syn-éruptives et leur contrôle sur les mécanismes et les styles éruptifs. Les macro textures des fragments juvéniles nous renseigneront sur la densité, la porosité et la perméabilité des roches éruptives. Le pourcentage, la morphologie, la taille et les distributions de taille des vésicules et des cristaux quantifieront leur nucléation et l’histoire de leur croissance. Ils seront utilisés pour quantifier les taux de décompression et les vitesses d’ascension.
WP4 : Quels sont les signaux de surveillance à attendre pour chaque scénario magmatique/éruptif ?
Dans le WP4, nous étudierons la corrélation entre les processus pré-éruptifs et éruptifs de chaque scénario magmatique et les signaux de surveillance potentiels associés. Par exemple, en utilisant les données issues des études pétrologiques des WP2 et WP3, couplées à des modèles de cristallisation fractionnée, nous estimerons (1) la quantité de magma mis en place avant chaque éruption, et (2) la chaleur latente, associée à la cristallisation, libérée. Ces résultats seront ensuite discutés (i) en termes de déformations qui peuvent être enregistrées pour le réseau géodésique de la Soufrière, et (ii) en termes de flux de chaleur à la surface. Enfin, nos différents scénarios magmatiques, leurs phénomènes et les signaux de surveillance modélisés associés seront comparés à l’éruption de La Soufrière 2020-2021 à St Vincent et à l’éruption de Soufrière Hills à Montserrat (1995- en cours).
Enfin, les résultats du projet UNREST seront intégrés dans le Plan Orsec du volcan de la Soufrière de Guadeloupe, défini pour les autorités, afin d’affiner les scénarios éruptifs magmatiques plausibles.
Metcalfe 2022 A Insights into the origin and dynamics of past eruptions of La Soufrière de Guadeloupe from melt inclusions: implications for future unrest and environmental impact. Thèse, IPGP.
Vlastélic et al., (2023). Arc volcano activity driven by small-scale metasomatism of the magma source. Nat. Geosci. 16, 363–370 https://doi.org/10.1038/s41561-023-01143-0

Photo de La Soufrière de Guadeloupe prise le 29 mars 2024 par l’IPGP-OVSG.